Régime matrimonial

Sommaire

Le mariage implique des conséquences pécuniaires pour partie légales, pour partie conventionnelles.

Le mariage civil a pour objet d'organiser la vie commune des époux. À ce titre, il a des conséquences importantes sur leurs patrimoines respectifs, en partie fonction du régime matrimonial choisi.

 

Régime primaire du mariage

Quel que soit le régime matrimonial choisi, les époux sont soumis à un régime auquel il n'est pas possible de déroger.

Contribution aux charges du mariage

La contribution aux charges du mariage est obligatoire pour les époux :

  • Charges du mariage – elles concernent les besoins alimentaires du ménage mais aussi les dépenses relatives au logement, à l'éducation des enfants et au train de vie du ménage en général.
  • Modalités de contribution – en principe, il incombe aux époux de contribuer aux charges du mariage à proportion de leurs ressources respectives.
  • Exception – les époux peuvent librement fixer les modalités de contribution aux charges du mariage dans leur contrat de mariage ; cependant, malgré cette possibilité d'aménagement conventionnel, ils ne peuvent exclure totalement la règle de contribution.

Exemple : les époux prévoient dans leur contrat de mariage que l'époux A contribuera 2 fois plus que l'époux B aux charges du mariage ; l'enfant des époux prend des cours de badminton à 1 200 € l'année. L'époux A devra payer 800 €, l'époux B devra payer 400 €.

L’article 156 du Code général des impôts prévoit que la contribution aux charges du mariage peut être déduite du revenu de celui qui la verse à condition que les époux fassent l’objet d’une imposition distincte, et cela même lorsque ce versement a été effectué spontanément (article 3 de la loi de finances pour 2021).

Solidarité des dettes ménagères

Les époux sont également soumis à la solidarité des dettes ménagères :

  • Dettes ménagères – elles concernent les dépenses engagées par un époux pour l'entretien du ménage et l'éducation des enfants (loyer, alimentation, enseignement, soins médicaux…).
  • Règle de solidarité – la dette contractée par un époux engage le patrimoine des deux époux ; les créanciers peuvent donc se retourner indifféremment contre l'un ou l'autre des époux pour le règlement de la dette.

Bon à savoir : la règle de solidarité est d'ordre public, c'est-à-dire que les époux ne peuvent pas la modifier dans leur contrat de mariage.

  • Exception – la règle de solidarité des dettes ménagères est exclue pour certaines dépenses :
    • les dépenses manifestement excessives (le caractère manifestement excessif s'apprécie eu égard au train de vie du ménage, à l'utilité de l'opération et à la bonne foi du tiers contractant) ;
    • les achats à crédit et les emprunts (à moins que l'achat ou l'emprunt porte sur des sommes modestes et soit nécessaire aux besoins de la vie courante du ménage).

Exemple : les époux A et B sont mariés ; l'époux A achète un réfrigérateur à crédit pour la cuisine de leur nouvel appartement, mais il ne peut pas honorer le crédit. Le vendeur du réfrigérateur peut-il se retourner contre B pour obtenir le paiement de la dette contractée par A ? Oui, en principe, car l'achat d'un réfrigérateur est une dette ménagère ; mais comme l'achat à crédit est exclu de la règle de solidarité, le vendeur ne peut se retourner contre B que si le réfrigérateur ne représente pas un coût trop important et qu'il est réellement nécessaire (les époux n'en avaient pas).

Bon à savoir : le cautionnement donné par un époux marié sous la séparation de biens doit être proportionné à ses seuls biens et revenus personnels. Ainsi, les juges ne peuvent pas conclure que l’engagement de la caution est proportionné à ses biens et revenus du fait que son conjoint est en mesure de contribuer de manière importante aux charges de la vie courante (Cass. com., 24 mai 2018, n° 16-23.036).

Pouvoirs des époux

Quel que soit le régime matrimonial choisi, les époux conservent certaines libertés individuelles :

  • Pouvoirs sur l'argent – un époux peut librement ouvrir un compte en banque, y verser des fonds et des titres et en disposer sans l'accord de l'autre ; il perçoit à titre individuel ses gains et salaires et en dispose librement, à condition de s'être préalablement acquitté des charges du mariage.

Bon à savoir : en revanche, lorsque les sommes provenant des gains et salaires ont été économisées, elles deviennent des biens communs. À ce titre, la donation portant sur les biens communs nécessite le concours du conjoint du donateur pour être valable (Cass. 1re civ., 20 novembre 2019, n° 16-15.867).

  • Pouvoirs sur les biens personnels – chaque époux dispose librement des biens meubles qu'il détient à titre individuel ; il peut passer, seul, des actes sur ces biens.
  • Exception – en cas d'activité nuisible d'un époux, le juge peut l'empêcher d'accomplir seul ces actes, à condition que l'époux mette gravement en péril les intérêts pécuniaires du ménage.

Précisions sur les pouvoirs judiciaires d'un époux 

En cas de crise dans le fonctionnement du régime matrimonial, 2 mesures peuvent être prises :

  • Un époux peut se faire autoriser à agir sans le consentement de son conjoint, pour éviter la paralysie du régime matrimonial. L'article 217 du Code civil offre une solution aux situations de crise conjugale, au cours de laquelle l’un des époux peut empêcher la conclusion de certains actes, sans que son refus ait un quelconque rapport avec l’intérêt de la famille qu'il met alors en péril. Il permet aussi d'éviter une procédure judiciaire de placement sous un régime d’incapacité de l’un des époux, tout en permettant de conclure un acte nécessaire. L’acte ainsi passé par le conjoint autorisé par le juge produit les mêmes conséquences que si le conjoint avait donné son accord exprès.
  • Un époux peut également être habilité à représenter son conjoint. Selon les dispositions de l'article 219 du Code civil, si l’un des époux se trouve hors d’état de manifester sa volonté, l’autre peut se faire habiliter en justice à le représenter « dans l’exercice des pouvoirs résultant du régime matrimonial, les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixées par le juge ».

Bon à savoir : il s’agit là d’une mesure applicable à tous les régimes matrimoniaux, permettant à un époux d'agir sans devoir mettre en œuvre une protection adaptée et judiciaire de son conjoint ; l’article 219 permet une réelle représentation, ce qui implique que le patrimoine du représenté peut s’en trouver affecté.

Précisions sur la notion de péril de l'intérêt de la famille 

A contrario, le Code civil prévoit des règles pour limiter les pouvoirs d’un époux qui, par ses agissements, met en péril les intérêts de la famille. Ainsi, selon les termes de l'article 220-1 alinéa 1er du Code civil, « si l’un des époux manque gravement à ses devoirs et met en péril les intérêts de la famille, le juge aux affaires familiales peut prescrire toutes les mesures urgentes que requièrent ces intérêts ». Ces mesures doivent être temporaires, ne pouvant excéder 3 ans.

En outre, la loi du 26 mai 2004 a ajouté à l’article 220-1 l’alinéa suivant, toujours en cas de réelle urgence : « Lorsque les violences exercées par l'un des époux mettent en danger son conjoint, un ou plusieurs enfants, le juge peut statuer sur la résidence séparée des époux en précisant lequel des deux continuera à résider dans le logement conjugal. Sauf circonstances particulières, la jouissance de ce logement est attribuée au conjoint qui n'est pas l'auteur des violences. Le juge se prononce, s'il y a lieu, sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et sur la contribution aux charges du mariage. »

Choix du régime matrimonial

Les futurs époux doivent choisir leur régime matrimonial :

Il est possible pour les époux de modifier leur régime matrimonial, ou même d'en changer entièrement, à tout moment au cours de leur mariage, par un acte notarié (article 1397 du Code civil, tel qu'issu de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019). 

Bon à savoir : en cas de changement de régime matrimonial, les enfants majeurs du couple doivent obligatoirement être informés personnellement de la modification envisagée ; ils disposent alors d'un délai de 3 mois pour s'opposer à ce changement (article 1397 du Code civil) ; ils peuvent aussi agir en nullité de la convention de changement de régime matrimonial dans les 5 ans après la découverte de la cause de nullité.

À noter : depuis le 25 mars 2019, l'homologation du juge n'est plus nécessaire en cas de changement de régime matrimonial en présence d'enfants mineurs (loi n° 2019-222 du 23 mars 2019).

Le choix du régime matrimonial influe principalement sur le régime des biens : les modalités de disposition des biens par les époux pendant le mariage et après dissolution du mariage.

Ce choix du régime matrimonial se fait en fonction de la situation du couple.

  Un seul époux exerce une activité rémunérée Chaque époux possède un patrimoine important Existence d'enfants d'un 1er mariage
Communauté universelle × Déconseillé : les patrimoines des 2 époux sont exposés aux créanciers. Déconseillé : les enfants supportent des droits de succession très importants.
Communauté réduite aux acquêts × Déconseillé  
Participation aux acquêts × ×  
Séparation de biens Déconseillé : à la dissolution du mariage, celui qui n'exerce pas d'activité rémunérée se retrouve démuni. × ×

Bon à savoir : en cas de divorce, un époux marié sous le régime de la communauté réduite aux acquêts doit apporter la preuve que les meubles lui sont propres (qu'ils lui appartiennent personnellement) afin de pouvoir les emporter ; pour déterminer le fait qu'un meuble est un bien propre, le juge prend en compte, en l'absence d'inventaire ou autre preuve préconstituée, tout écrit (titres de famille, registres et papiers domestiques, documents bancaires et factures) ; il peut aussi admettre les témoignages ou la présomption, s'il constate qu'un époux a été dans l'impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit.

À noter : depuis le 1er janvier 2020, tout changement de régime matrimonial en vue de l’adoption d’un régime communautaire donne lieu au paiement d’une taxe de publicité foncière de 125 € et, en cas de transfert de propriété, d'une taxe de publicité foncière représentant 0,715 % de la valeur du bien immobilier transmis (loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019).

Option des avantages matrimoniaux

Si les époux peuvent choisir librement de rédiger ou non un contrat de mariage, il leur est également possible d'envisager des règles de partage inégalitaire lors de la liquidation du régime matrimonial et du partage des biens.

On parle alors d'avantages matrimoniaux, qui permettent de transmettre tout ou partie d'un patrimoine à son conjoint, aux termes de conventions adjointes dans leur contrat de mariage. Non assimilés à des donations, ces avantages matrimoniaux ne sont pas soumis aux règles du droit successoral et échappent aux règles du rapport au moment de l'ouverture de la succession.

Bon à savoir : toutefois, pouvant porter atteinte à la réserve héréditaire des enfants issus d'une première union, ces avantages matrimoniaux peuvent faire l'objet d'une action en retranchement selon les dispositions de l'article 1527 du Code civil et être réduits.

Clause d'attribution intégrale des biens de la communauté 

Dans le cadre d'un régime de communauté, et grâce cette clause, tous les biens acquis ou possédés par les époux, avant ou pendant leur union, sont communs.
  • Lorsque la clause est adjointe à un régime de participation aux acquêts, elle implique que, lors du règlement de la succession du défunt, la liquidation ne porte que sur les biens propres de ce dernier.
  • L'insertion de cette clause dans le régime de communauté universelle permet d'envisager au décès de l'un des conjoints une attribution intégrale des biens de communauté à l'autre. Ce qui signifie que les biens ainsi transmis ne seront pas partagés, mais attribués intégralement au survivant en franchise d'impôt.

Bon à savoir : dans ce cadre, le conjoint survivant peut vendre les titres inscrits dans le PEA du défunt, sans qu’aucune formalité ne soit à remplir.

Clause de préciput

La clause de préciput, encore appelée « clause de partage inégal », permet de protéger le conjoint survivant. Celui-ci aura la faculté, grâce à cette disposition, de  prélever sur le patrimoine commun, et avant tout partage, un ou plusieurs biens, notamment le domicile familial, et sans contrepartie financière.

Clause de partage inégal de la communauté 

En principe, la communauté est répartie par moitié entre les époux. Grâce à cette clause, le conjoint survivant peut recevoir une part de communauté supérieure à la moitié : les 2/3, les 3/4, voire l'intégralité de la communauté.

Bon à savoir : pour permettre à la clause de produire effet, le notaire conseille aux époux de faire renoncer les héritiers, de façon expresse dans l'acte, à leur droit de retour ou de reprise des apports ; en effet, selon la loi, sans renonciation de leur part, ils ont la faculté de reprendre les biens apportés à la communauté par leur auteur et ceux qu'il a reçus par donation ou succession, ce qui implique la réduction de la masse de biens à recevoir par le conjoint survivant.

Clause dite de « société d'acquêts »

Dans le cadre du régime de la séparation de biens avec société d'acquêts, les époux peuvent intégrer une catégorie précise de biens acquis au cours de leur union.

Il est également permis par la loi d'insérer, en complément, des clauses de préciput ou de partage inégal dans cette société d'acquêts.

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